Trahison !


SADDAM, KADHAFI, BACHAR el-ASSAD.

MADURO aujourd'hui?...

L'événement est passé presque inaperçu fin de l'été 2012: la Gauche de Gauche et les médias alternatifs ont emboîté le pas à BHL sur le terrain de la Syrie.

Des preuves ?

- Le 9 février 2012 la CGT, la CFDT, l'UNSA, Solidaires et la FSU publient dans un communiqué commun:

"Assad a déclaré la guerre à son propre peuple. Face à ces crimes contre l’humanité, les responsables de ce régime qui ne possèdent plus aucune légitimité devront répondre devant la justice des atrocités commises"

Il y a à cette époque déjà des milliers de djihadistes *internationaux*sur le sol syrien…


- Mai 2012, le NPA se positionne sans ambages: (autocollant)




Fin août, renchérissant sur un matraquage médiatique particulièrement virulent, d’autres poursuivent :


- Sur le blog PCF82 le 15 août 2012:

« Le régime Assad maintien la population dans la peur et la terreur atteint son paroxysme. » (1)

Toujours aucune allusion sur le rôle des mercenaires djihadistes dans cet article.

- Médiapart, 18 août 2012, Albert Herszkowicz:

« Tout média, toute personnalité qui établit une symétrie entre les forces du régime Al Assad et celles qui le combattent, offre de fait un regain de soutien à ce régime de type fasciste, dont les horreurs rivalisent avec celles commises contre les résistants par le régime nazi. » (2)


- Et le lendemain 19 août 2012, 1ère page:

Syrie : « La société tient bon face à l’Etat de barbarie »
« … l’aveuglement persistant de la communauté internationale qui considère le système Assad comme un Etat et non une mafia identifiée à un clan et un homme … » (3)

Apprécions l’impartialité des exposés !

- L'Humanité du 20 août 2012:

« Pour Jean-Luc Mélenchon, la première chose à faire c’est aller voir la Russie et la Chine et leur demander fermement (…) le départ d’Assad. » (4)



La seule et unique cause de ces tueries serait donc...

→ ASSAD ←



Rassurer-vous, ce billet n’a pas pour intention de dédouaner Bachar el-Assad qui porte une part évidente de responsabilités dans ce qu’il advient de son peuple, il cherche simplement à nuancer l’analyse tendancieuse et caricaturale qui nous est imposée par la propagande atlantiste et maintenant par un contre-pouvoir qui manifestement est défaillant.

C’est donc bien la Gauche de Gauche qui se positionne désormais en faveur de l’impérialisme occidental en Syrie comme elle l’a fait précédemment pour la Libye et comme elle a applaudit des deux mains les révolutions arabes qu’elle s’est complue à confondre avec les révolutions romantiques de son imaginaire. L’idéalisme de la gauche est une incontestable qualité… tant qu’il ne s’affranchit pas des réalités.

Mettre en doute la spontanéité des révolutions arabes signifie, encore aujourd’hui, endosser l’habit inconfortable du conspirationiste. Pourtant il est désormais avéré que causes et effets de ces soulèvements ne coïncident en rien sinon en ce qui concerne le départ d’un dictateur. Est également évident le fait que la seule des trois révolutions du Maghreb ayant posé problème s’est vu aussitôt secourue par l’OTAN. Que se serait-il passé si la même incertitude avait plané sur la Tunisie et/ou l’Egypte ?...

Avec des « si », diront certains… OK ! Regardons alors le passé récent, ou moins récent, de la région où nous ne pouvons ignorer la disparition systématique des régimes "laïcs" depuis l’Iran de Mossadegh et plus tard du Chah, l’Egypte de Nasser, la Palestine de Yasser Arafat et, plus récemment, l’Irak de Saddam Hussein, la Tunisie de Ben Ali, l’Egypte de Moubarak, la Libye de Mouammar Kadhafi, le Yémen de Ali Abdullah Saleh. Il est notoire que la plupart de ces disparitions sont l’œuvre de l’Occident. Qui oserait prétendre que le sort de la Syrie de Bachar el-Assad n’est pas inscrit sur ce même tableau ?...

Regardons également les faits présents : le soutient explicite de l’Occident et de ses alliés à la subversion au mépris du droit international affirmant la souveraineté des nations, l’infiltration de dizaines de milliers de « fous de Dieu » étrangers, la menace d’intervention US en cas de présence d’armes chimiques rappelant singulièrement les armes de destruction massives (inexistantes) de Saddam Hussein, le battage médiatique et la désinformation crasse dont nous sommes victimes quotidiennement (le JT de 19h45 sur Arte est un exemple du genre)…

A ces faits s’ajoute le plus insupportable, le calvaire d’une population qui peut-être ne jouissait pas d’une gouvernance exemplaire, les régimes dynastiques étant rarement des modèles de démocratie, mais vivait en bonne intelligence par delà cultures et religions. Comme les populations d’Irak et de Libye elle endure aujourd’hui mille fois plus d’horreurs que si elle avait eu à souffrir du maintient (probablement provisoire) du régime baasiste, si tant est que ce dernier fut à l’image de celles que nos médias nous fabriquent.

Au vu de ce bouleversement idéologique de la gauche face à un impérialisme de surcroit libéral nous pouvons légitimement nous poser la question de savoir si nous assistons à une mutation profonde des valeurs socialistes ou, tout bonnement, à une trahison ? Voila qui serait loin d’être une nouveauté, souvenons-nous de « l’union sacrée » de 1914 où les partis socialistes européens ont renié leur opposition à la guerre pour se rallier à leurs bourgeoisies respectives ou des accords de Matignon (5) en 1936 suite auxquels partis de gauche et syndicats joueront aux casseurs de grève.   

Ce rappel au siècle dernier n’est pas fortuit, avec l'affaire syrienne nous sommes aujourd’hui à deux doigts d’une guerre mondiale dont il serait criminel d’ignorer les prémices. Or nous assistons au ralliement de la gauche aux thèses impérialistes visant à se saisir par la force d’une région particulièrement sensible pour la Russie et pour la Chine (et pour nous aussi soit dit en passant). Ajouté à cela, et c’est très loin de constituer un détail anodin, une crise de laquelle le capitalisme ne pourra guère se dépêtrer sans conflit MAJEUR, ce à quoi il a toujours eu recours pour se refaire une santé.

La SEULE possibilité de se tirer de ce guêpier c’est, comme le propose Annie Lacroix-Riz (6), d’initier une révolution dans un pays impérialiste important empêchant ce dernier d’entreprendre quelque aventure belliqueuse que ce soit et refrénant les ardeurs de ses semblables. Pour cela il faut que les populations se bougent or, comment le pourraient-elles si l’opposition collabore, si la gauche se parjure ?...

Une révolution ne s’improvise pas, ne se décide même pas, elle se suggère et lorsqu’elle survient il faut savoir l’accompagner. Aucune instance de gauche, partis ou syndicats, ne la suggère sérieusement aujourd’hui et bien évidemment ne serait en mesure de l’accompagner, c’est là que nous nous retrouvons démunis, désarmés. A nous de dénoncer la trahison de cette prétendue gauche et des médias dits alternatifs. Diffusons des messages semblables à celui-ci aux quatre coins de la toile, listons les preuves de la forfaiture, convainquons le peuple de gauche qu’il est grugé tant par les médias aux ordres que par leurs propres structures et qu’il ne s’agit pas ici de ne sauver que la population syrienne, ce qui serait déjà pas mal, mais aussi de sauvegarder la paix mondiale.

Le capital est en phase terminal, il fera tout pour s’en sortir même remettre en cause notre survie à tous.



Ajout au 04/08/2017:


Cinq ans plus tard l'histoire se répète, le Venezuela de Maduro vacille sous les coups d'une insurrection clairement fomentée par l'Oncle Sam. Chez nous, en France, la gauche détourne pudiquement le regard lorsqu'elle ne s'acharne pas ouvertement sur un régime qui utilise, comme le castrisme avant lui, des moyens dont il dispose pour contrer la contre-révolution que lui impose l'Empire.

Modèle du genre le communiqué d'Ensemble, mouvement affilié à la France Insoumise, dont Clémentine Autain est porte parole:
"... le gouvernement Maduro a choisi la fuite en avant dans le seul objectif de se maintenir au pouvoir."


4-      http://www.humanite.fr/politique/melenchon-si-vous-etes-si-sur-de-votre-traite-pourquoi-vous-ne-demandez-pas-son-avis-au-pe
5-      Quelques jours plus tôt, le 7 mai 1936 lors d’une conférence de presse, Jacques Duclos, assure que le PCF respectera la propriété privée. Quant à Léon Blum, il déclare lors d’un meeting salle Wagram le 15 mai : « Donnons au pays l’impression du changement qu’il veut. »
6-      Annie Lacroix-Riz : « Si les peuples ne bougent pas, il y aura une guerre générale. Le capitalisme ne peut pas, dans la situation de crise où il est, esquiver une guerre générale. Mais, après tout, il peut y avoir une issue autre. Ça ne s’est jamais produit mais finalement ce n’est pas intellectuellement, formellement, politiquement impossible. On peut imaginer que dans un pays impérialiste (...) ceux d’en bas, ne supportant plus du tout ceux d’en haut, se mettent très très très très très en colère (...). »
« S’il y avait une révolution dans un pays impérialiste important, il est clair que l’impérialisme ne pourrait pas déclencher une guerre générale. (...) Plus les populations se bougent, plus on a des chances de survie dans des bonnes conditions. Je ne vois vraiment pas d’autres possibilités. »
http://www.montpellier-journal.fr/2010/05/si-les-peuples-ne-bougent-pas-il-y-aura-une-guerre-generale.html

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ÉTAT DES LIEUX QUATRE ANS PLUS TARD:
Lettre ouverte aux charlatans










Lettre ouverte aux charlatans de la révolution syrienne. 

Par Bruno Guigue (13 mai 2016)

Double attentat, en mai 2012 à Damas, revendiqué par le groupe terroriste al-Nosra, faisant plus de 60 morts et près de 400 blessés.


Au moment où un dirigeant historique de la résistance arabe libanaise, en Syrie, vient de mourir sous les coups de l’armée sioniste, j’adresse cette lettre ouverte aux intellectuels et militants de « gauche » qui ont pris parti pour la rébellion syrienne et croient défendre la cause palestinienne tout en rêvant de la chute de Damas.


Vous nous disiez, au printemps 2011, que les révolutions arabes représentaient un espoir sans précédent pour des peuples subissant le joug de despotes sanguinaires. Dans un excès d’optimisme, nous vous avons écoutés, sensibles à vos arguments sur cette démocratie miraculeusement naissante et à vos proclamations sur l’universalité des droits de l’homme. Vous aviez presque réussi à nous persuader que cette protestation populaire qui emporta les dictateurs tunisien et égyptien allait balayer la tyrannie partout ailleurs dans le monde arabe, en Libye comme en Syrie, au Yémen comme à Bahreïn, et qui sait où encore.


Mais cette belle envolée lyrique laissa rapidement paraître quelques failles. La première, béante, apparut en Libye. Adoptée par le conseil de sécurité pour secourir des populations civiles menacées, une résolution de l’ONU se transforma en chèque en blanc pour la destitution manu militari d’un chef d’Etat devenu encombrant pour ses partenaires occidentaux. Digne des pires moments de l’ère néoconservatrice, cette opération de « regime change » accomplie pour le compte des USA par deux puissances européennes en mal d’affirmation néo-impériale aboutit au désastre dont la malheureuse Libye continue de payer le prix. L’effondrement de ce jeune Etat unitaire livra le pays aux ambitions effrénées des factions et des tribus, sciemment encouragées par les convoitises pétrolières des charognards occidentaux.


Il y avait pourtant de bonnes âmes, parmi vous, pour accorder des circonstances atténuantes à cette opération, comme il y en avait, davantage encore, pour exiger qu’un traitement analogue fût infligé au régime de Damas. Car le vent de la révolte qui soufflait alors en Syrie semblait valider votre interprétation des événements et donner une justification a posteriori au bellicisme humanitaire déchaîné contre le potentat de Tripoli. Pourtant, loin des médias « mainstream », certains analystes firent observer que le peuple syrien était loin d’être unanime, que les manifestations antigouvernementales se déroulaient surtout dans certaines villes, bastions traditionnels de l’opposition islamiste, et que la fièvre sociale de couches paupérisées par la crise n’entraînerait pas pour autant la chute du gouvernement syrien.


Ces avertissements de bon sens, vous les avez ignorés. Comme les faits ne correspondaient pas à votre narration, vous les avez triés comme bon vous semble. Là où des observateurs impartiaux voyaient une polarisation de la société syrienne, vous avez voulu voir un tyran sanguinaire assassinant son peuple. Là où un regard dépassionné permettait de discerner les faiblesses, mais aussi les forces de l’Etat syrien, vous avez abusé de rhétorique moralisante pour instruire à charge le procès d’un gouvernement qui était loin d’être le seul responsable des violences. Vous avez vu les nombreuses manifestations contre Bachar Al-Assad, mais vous n’avez pas vu les gigantesques rassemblements de soutien au gouvernement et aux réformes qui emplirent les rues de Damas, Alep et Tartous. Vous avez dressé la comptabilité macabre des victimes du gouvernement, mais vous avez oublié celles des victimes de l’opposition armée. A vos yeux, il y avait de bonnes et de mauvaises victimes, des victimes qui méritent qu’on en parle et des victimes dont on ne veut pas entendre parler.


Délibérément, vous avez vu les premières, tout en vous rendant aveugles aux secondes.


Au même moment, ce gouvernement français, dont vous critiquez volontiers la politique intérieure pour entretenir l’illusion de votre indépendance, vous a donné raison sur toute la ligne. Curieusement, la narration du drame syrien qui était la vôtre coïncidait avec la politique étrangère de M. Fabius, chef d’œuvre de servilité mêlant l’appui inconditionnel à la guerre israélienne contre les Palestiniens, l’alignement pavlovien sur le leadership américain et l’hostilité recuite à l’égard de la résistance arabe. Mais votre mariage ostensible avec le Quai d’Orsay ne sembla pas vous gêner. Vous défendiez les Palestiniens côté cour, et vous dîniez avec leurs assassins côté jardin. Il vous arriva même d’accompagner les dirigeants français en visite d’Etat en Israël. Vous voilà embarqués, complices, pour assister au spectacle d’un président qui déclare qu’il « aimera toujours les dirigeants israéliens ». Mais il en fallait plus pour vous scandaliser, et vous avez repris l’avion avec le président, comme tout le monde.


Vous aviez condamné à juste titre l’intervention militaire américaine contre l’Irak en 2003. La vertu roborative du bombardement pour la démocratie vous laissait froids, et vous doutiez des vertus pédagogiques des frappes chirurgicales. Mais votre indignation à l’égard de cette politique de la canonnière version « high tech » s’avéra étrangement sélective. Car vous réclamiez à cor et à cri contre Damas, en 2013, ce que vous jugiez intolérable dix ans plus tôt contre Bagdad. Une décennie a suffi pour vous rendre si malléables que vous voyiez le salut du peuple syrien, désormais, dans une pluie de missiles de croisière sur ce pays qui ne vous a rien fait. Reniant vos convictions anti-impérialistes, vous avez épousé avec enthousiasme l’agenda de Washington. Sans vergogne, non seulement vous applaudissiez par avance aux B 52, mais vous repreniez la propagande US la plus grotesque, dont le précédent irakien et les mensonges mémorables de l’ère Bush auraient dû vous immuniser.


Pendant que vous inondiez la presse hexagonale de vos inepties, c’est un journaliste américain, enquêteur hors pair, qui mit en pièces le pitoyable « false flag » destiné à rendre Bachar-Al-Assad responsable d’une attaque chimique dont aucune instance internationale ne l’a accusé, mais que les expertises du Massachussets Institute of Technology et de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques, en revanche, ont attribuée à la partie adverse. Ignorant les faits, les travestissant au besoin, vous avez joué à cette occasion votre misérable partition dans cette cacophonie de mensonges. Pire encore, vous continuez de le faire. Alors qu’Obama lui-même laisse entendre qu’il n’y a pas cru, vous vous obstinez à réitérer ces sornettes, comme des chiens de garde qui aboient après la disparition de l’intrus. Et pour quel motif ? Pour justifier le bombardement, par votre propre gouvernement, d’un petit Etat souverain dont le tort principal est de refuser l’ordre impérial. Pour venir en aide à une rébellion syrienne dont vous avez sciemment masqué le véritable visage, accréditant le mythe d’une opposition démocratique et laïque qui existe seulement dans les salons des grands hôtels de Doha, de Paris ou d’Ankara.


Cette « révolution syrienne », vous l’avez donc exaltée, mais vous avez pudiquement détourné les yeux de ses pratiques mafieuses, de son idéologie sectaire et de ses financements troubles et douteux. Vous avez soigneusement occulté la haine interconfessionnelle qui l’inspire, cette aversion morbide pour les autres confessions directement inspirée du wahabisme qui en est le ciment idéologique. Vous saviez que le régime baassiste, parce qu’il est laïque et non confessionnel, constituait une assurance-vie pour les minorités, mais vous n’en aviez cure, allant même jusqu’à qualifier de « crétins » ceux qui prenaient la défense des chrétiens persécutés. Mais ce n’est pas tout. A l’heure du bilan, il restera encore cette ultime ignominie : vous avez cautionné la politique d’un Laurent Fabius pour qui Al-Nosra, branche syrienne d’Al-Qaida, « fait du bon boulot ». Tant pis pour les passants déchiquetés dans les rues de Homs ou les alaouites de Zahra assassinés par les rebelles : à vos yeux, ils ne sont que du menu fretin.

Entre 2011 et 2016, les masques tombent. Vous vous réclamez du droit international, mais vous applaudissez à sa violation contre un Etat souverain. Vous prétendez promouvoir la démocratie pour les Syriens, mais vous êtes devenus les fourriers du terrorisme qu’ils endurent. Vous dites que vous défendez les Palestiniens, mais vous êtes dans le même camp qu’Israël. Lorsqu’un missile sioniste s’abat sur la Syrie, n’ayez crainte : il ne frappera jamais vos amis. Grâce à Israël, grâce à la CIA, et grâce à vous, ces courageux rebelles vont continuer à préparer l’avenir radieux de la Syrie sous l’emblème du takfir. Le missile sioniste, lui, va tuer un des dirigeants de cette résistance arabe que vous avez trahis.



Bruno Guigue | 13 mai 2016