Tout d'abord, qu'est-ce que la gauche?
Si une réponse claire et précise existait la gauche
actuelle ne serait peut-être pas dispersée comme elle l'est face à
l'offensive antisociale sans précédent en cours.
Pour
beaucoup
la gauche se caractérise par l'aspiration aux changements
en faveur des classes sociales les plus modestes mais ce concept est
pour le
moins… élastique; est-ce être de gauche que de vouloir la misère
secourue
plutôt que supprimée(1)? Si oui les bonnes âmes de la bourgeoisie qui ont "leurs" pauvres ou les patrons paternalistes du XIXème siècle seraient tous
d'impénitents gauchistes.
Historique, le clivage droite/gauche correspond à une intuition largement répandue percevant l'opposition de deux classes via un conflit d'intérêt plus qu'évident, la classe dominante et ses comparses tirant leurs privilèges respectifs de la soumission de la classe laborieuse. Cette lutte des classe est un constat, le produit de notre espèce qui, par sa nature sociale, se trouve tenue à préserver tant ses intérêts individuels que collectifs mais pèche en privilégiant les premiers, obéissant ainsi à la loi du plus fort.
Dans cette perspective s'opposent donc une logique individualiste favorisant les individus mais aussi leurs prolongements naturels que sont les groupes d'appartenance (familles, entreprises, nations, ethnies...) et une logique collectiviste, ou plutôt socialiste au sens générique du terme, avantageant la société dans son ensemble, partant du principe que la société c'est "tous" les individus. Et qu'est-ce que la « loi du marché » sinon la mise en concurrence non seulement des produits mais également des individus et de leurs groupes d’appartenance?
El compañero Loukanikos |
Mais les inconditionnels du libéralisme prétendent qu'aucun régime socialiste n'a jamais prouvé sa viabilité. Quel régime libéral pourrait survivre à 50 ans de blocus économique comme l'a fait Cuba? Si, néanmoins, il faut bien reconnaître que nombre d'expériences socialistes ont échoué la cause en est souvent qu'elles se sont heurtées à l'idéologie la plus efficacement violente qu'ait jamais engendré l'humanité: la loi de la jungle rationalisée et institutionnalisée qu'est le libéralisme.
Qui dit "loi du marché" dit "concurrence", "rivalité". C'est du moins l'image que nous en donne le capitalisme. Mais le marché n'est-il pas constitué de l'offre et de la demande? Notre système ne confond-t-il pas "loi du marché" et "loi de l'offre"? En fait il ne confond pas, il assume! La loi de Say affirme que "l'offre crée sa propre demande". La loi du bon sens estime pour sa part que, dans le domaine de la production et non de la création, la demande est la seule raison d'être de l'offre, la seule à permettre une vie sociale apaisée dès lors que l'offre est suffisante.
Or, l'humanité est plus riche que jamais et l'offre alimentaire serait assuré, avec nos moyens de production actuels, pour une population humaine allant jusqu'à 12 milliards d'individus; nous n'en sommes aujourd'hui qu'à 7 milliards! Certes un minimum de précautions seraient à prendre au niveau du gaspillage des matières premières et des équilibres écologiques mais une économie de la demande y contribuerait naturellement en neutralisant les dynamiques de mode, de l'obsolescence programmé ou autres absurdités consuméristes.
Reste le gros soucis de l'explosion démographique que d'aucuns estiment insoluble. Pourtant celle-ci pourrait aisément être contenue par une répartition équitable de la richesse. Tous les pays riches sont en déficit démographique à l'inverse de tous les pays qu'ils exploitent. Devinez pourquoi!... Selon le rapport OXFAM 2018 ², les 1 % les plus riches possèdent plus de richesses que le reste de l'humanité. Distribuer ces richesses reviendrait donc en gros à doubler les avoirs de chacun, répartir les richesses des 10% les plus riches et le résultat serait bien plus spectaculaire encore, mais allez donc proposer à un capitaliste de partager...
1- "Vous voulez la misère secourue, moi, je la veux supprimée."
(Victor Hugo - 1802-1885 - Aux élus de droite de la chambre des députés
2- Credit Suisse, Global Wealth Databook 2017
David Cayla : "L'enseignement de l'économie doit se rapprocher des autres sciences humaines"